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Pierre-Lin Renié : T’arrive-t-il d’intervenir tout aussi directement au tirage ?

Vincent Ballard : Dans certaines images, je dessine avec un pointeur laser sur les feuilles en cours d’exposition sous l’agrandisseur. Les traits bleus ainsi produits signalent la surface du papier, comme une rayure signale l’existence d’une vitre qui jusqu’alors était invisible.

Je voulais qu’ils puissent être perçus comme des éléments perturbateurs. Ces traits interagissent avec l’image sur laquelle ils sont tracés, tout en étant par dessus, et pourtant avec elle, indissociables.

Cela ne produit aucun relief, comme l’aurait fait un trait de feutre sur le papier ou le collage d’une matière. Tout est dans un bloc, d’un seul tenant, et ne l’est en même temps pas tout à fait. J’aime jouer avec ce paradoxe de la surface photographique : paraître à la fois plane et profonde. ¶ Tout comme les autres gestes que je mets en œuvre, ce type d’intervention n’est possible qu’avec du papier photographique. D’ailleurs, je ne travaille quasiment plus qu’en argentique, non par nostalgie, mais pour la nature des possibilités qu’offre ce matériau.

Les moyens d’agir sur la formation des images y sont beaucoup plus nombreux qu’en numérique. Tous les éléments (négatif, papier, chimie, lumière colorée) sont concrets et tangibles ; ils peuvent être manipulés, subir des  transformations, etc. Je peux intervenir physiquement à chaque étape de la réalisation.

Chaque image est potentiellement prête à basculer par une intervention qui rend chaque épreuve unique, tout en ne perdant aucune de ses qualités proprement photographiques. 

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Entretien réalisé avec Pierre-Lin Renié à l’occasion de la sortie du catalogue de l’exposition Adieu, Commissaire



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